Un maillage serré de lignes et de figures
aux tonalités chatoyantes, dont l’exubérance formelle repose sur une
architecture de l’instinct, telle apparaît au premier regard l’œuvre du
peintre Gaël BIRON.
Celui qu’une passion sans bornes pour la terre
africaine et ses habitants dévore depuis l’enfance, ne cesse, tout au
long de ses compositions, de pousser un chant d’amour pour cette patrie
symbolique, ce berceau culturel de sa propre humanité.
Il serait donc tentant de parler, à propos des tableaux de
ce peintre, d’un travail sous influence africaine, mais ce serait
réduire considérablement une quête infiniment plus ramifiée qu’il n’y
paraît, dans laquelle on relève tout aussi bien, pour ne citer qu’eux,
des réminiscences du mouvement Cobra, des accents calligraphiques
proches de l’héritage celte, de l’enluminure moyenâgeuse ou même
quelques échos des symboliques océanienne et toltèque.
Et pour une approche plus exhaustive de l’œuvre, il
faudrait évoquer également l’autre origine , la biologique,
l’héréditaire, car l’homme est, par ses racines, proche du monde
paysan, du remueur de glèbe auquel ses mots rendent fréquemment
hommage. C’est donc aussi par fidélité à cette première filiation qu’il
cultive de façon délibérée une réelle rusticité des supports et des
procédés, une longue patience ainsi qu’une prédilection pour les
matières puissantes, onctueuses, sensuelles.
Petit format, vaste panneau, diptyque ou triptyque, chaque
création, précédée de croquis nombreux, s’élabore lentement,
sous-tendue par une armature puissante garantissant les accrochages
successifs de ses matériaux favoris : bois, grillages, enduits, toile
de jute, cartons et papiers divers sublimés par le jeu des pigments, se
succèdent ainsi, s’épaulent et s’enchevêtrent pour, à partir d’une
ébauche fragmentaire apparemment tâtonnante et improbable, mettre à
jour progressivement une peinture structurée et cohérente ordonnée au
sein d‘un foisonnement très complexe.
Etonnement du spectateur, d’abord, en présence de ce
canevas multidirectionnel qui pourrait s’apparenter à celui d’une
fresque, un étrange labyrinthe où l’œil hésite avant de
trouver son chemin, car Gaël BIRON est comme ces griots affectionnés de
lui qui jamais ne craignent, au cœur de leur récit, de multiplier les détours pour mieux
servir leur intention première. Impossible donc de pratiquer ici une
lecture linéaire, de chercher à déceler un quelconque nombre d’or par
trop occidental; aussi est-ce la machette du découvreur à la main que
l’on se doit de plonger dans la brousse de ce treillis luxuriant…
Jeu de piste, donc, ou plutôt parchemin à dessein
initiatique qui fait profit de la gamme entière des couleurs des forêts
et savanes, le vert excepté : noir du mystère et des désirs calcinés,
bleu des grandes chaleurs, des espaces et des corps chauffés à fendre,
blanc du kaolin des danses et des rituels sacrés, marron de la
négritude tant aimée, ocres jaunes et rouges d’une terre hélas trop
souvent gorgée de sang…
La pluralité des mediums implique, quant à elle, un
recours aux gestes les plus variés, des plus retenus (dessins, glacis,
découpes, dégradés…) aux plus incisifs (déchirures, empreintes,
labours, griffures…). Il n’est dès lors pas surprenant que cette
diversité, hautement revendiquée par l’artiste, couplée à une curiosité
de tous les instants, le conduise à varier ses écritures, passant de la
peinture à la gravure, au bas-relief, au collage ou encore à la
sculpture, notamment celle de totems dont le caractère universel lui
permet d’établir une passerelle entre l’art brut européen et un certain
primitivisme qui lui est cher.
Que dire encore? Préciser l’importance de la figure
humaine dans le tableau, aux côtés d’animaux-symboles, messagers
emblématiques des mondes parallèles. Personnages stylisés, visages
traités souvent à la façon de profils égyptiens, tirant de la fixité de
leur regard une présence accentuée qui nous implique dans l’œuvre, nous
obligeant à la rencontre.
Car c’est bien de rencontre qu’il est avant tout
question dans l’univers de ce jeune homme doux à la carrure de
bûcheron. Telle est sa volonté : fouiller dans la matière et se laisser
fouiller par elle jusqu’à la mise à jour des couches secrètes au repli
desquelles il n’est plus question ni de race, ni de couleur, ni même
d’appartenance, sinon à celle de la simple humanité, de la plus tendre
fraternité : « Rejoindre l’universalité! » voilà son propre credo, sa
plus belle espérance, celle qui le jeta dès l’enfance dans une quête
intarissabledes signes, et dont nous le prions de ne plus jamais
revenir."
Guy BUGEAU
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L'art primitif...
On dit de lui qu'il est naïf parce qu'il ose rêver ...
Le monde que
l'on observe par l'entremise de cet art n'est pas nécessairement celui
dans lequel nous sommes habitués à vivre ...
Il serait plutôt le
monde auquel nous rêvons, un monde d'innocence et sans péchés ...
C'est
un art qui présente le travail harmonieux de l'homme avec celui de ses
semblables, avec la nature et avec dieu ...
L'art primitif transmet
la paix et pourtant celle ci n'est pas ingénue...
La paix est plutôt
faite d'espoir et de croyance en un monde meilleur vers lequel nous
tendons par l'expression de notre art ...
L'art primitif est
chevaleresque ...
Il refuse d'accepter une réalité inhumaine et
deshumanisante ...
A cet égard il peut être considéré à juste titre
comme un art de la rébellion ...
MIGUEL D'ESCOTO BROCKMAN ...
(membre
honoraire de la fondation des artistes associés du Nicaragua dont la
citation apparait sur le dépliant de la fondation) ...
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